Éloi de Noyon
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Éloi de Noyon (Eligius en latin, l'«élu») (v. 588 - 1er décembre 660), évêque de Noyon, orfèvre et monnayeur, il eut une fonction de ministre des finances auprès de Dagobert Ier. Saint Éloi pour les Catholiques est fêté le 1er décembre. À Paris, on commémore le 25 juin la translation d'un de ses bras en la cathédrale Notre-Dame de Paris en 1212.
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[modifier] Biographie
Éloi est né à Chaptelat près de Limoges en Limousin vers 588 de parents gaulois[1] de condition libre. Il fut placé par son père, en apprentissage en Limoges chez Abbon, orfèvre réputé, qui fabriquait de la monnaie. Selon saint Ouen, au cours de son apprentissage, il « assistait fréquemment aux offices de l'église, où il écoutait avec une grande avidité tout ce qu'on disait des divines écritures. »
«Cependant, peu d'années après, des circonstances que Dieu, dans sa providence, avait sans doute amenés, le déterminèrent à quitter sa patrie et sa famille pour se rendre seul en France»[2]. C'est-à-dire au Nord de la Loire, et plus précisément à Paris.
Eloi entra au service de l'orfèvre Bobbon, qui reçut une commande du roi Clotaire II pour la fabrication d'un trône d'or orné de pierres précieuses. Clotaire II donna à Bobbon la quantité d'or nécessaire à la fabrication du siège, qui fût transmise à Eloi. Celui-ci fabriqua deux trônes en évitant la fraude sur la quantité d'or en ne prenant pas «prétexte des morsures de la lime, ou celui de la trop grande ardeur du feu». Ce qui fît que jusqu'à la révolution de 1789, on chanta un hymne dans l'église de Noyon, qui fût son évêché :
« Dum vas regi Clotario
Ex auri massa fabricat
Aurum in fabri studio
Summus faber multiplicat. »
Le divin ouvrier (summus faber) aurait multiplié l'or tandis qu'Eloi fabriquait le trône.
L'honnêteté d'Eloi paya, Clotaire II le garda dans son entourage. La confiance que porta le roi envers lui s'accrût lorsque Clotaire II voulu qu'Eloi prête serment, par la pose de ses mains, sur de saintes reliques. Eloi, redoutant Dieu, refusa. Devant l'insistance du roi, Eloi pleura pour son offense envers Clotaire II, et redouta sept fois plus de porter la main sur de saintes reliques.
L’orfèvre Éloi devint monétaire de Clotaire II, puis trésorier de Dagobert Ier avant d’être élu évêque de Noyon en 641.
Fondateur de monastères à Solignac et à Paris (monastère Saint-Martial), il accueillit sainte Godeberthe comme moniale à Noyon. Il est aussi considéré comme le fondateur de l'abbaye du mont Saint-Éloi située à l'ouest d'Arras.
Saint Éloi est réputé fondateur de l'église de Dunkerque. Il y aurait, selon la légende, pacifié le géant Allowyn, pour protéger Dunkerque des invasions et pillages des Vikings.
Quoique étant encore laïque, il fut élevé en 640 sur le siège de Noyon. Après son élection comme évêque de Noyon, saint Éloi a passé 20 ans à convertir la population druidique des Flandres et des Pays-Bas au christianisme. Son compagnon saint Ouen le relate dans sa Vita d'Eligius.
Investi de toute la confiance de Dagobert Ier, il remplit les missions les plus importantes et réussit notamment à amener Judicaël, duc des Bretons, à faire sa soumission en 636.
Éloi porta l'art de l'orfèvrerie à un degré de perfection extraordinaire pour son temps : les plus remarquables de ses ouvrages étaient les bas-reliefs du tombeau de saint Germain, évêque de Paris ; un grand nombre de châsses destinées à renfermer des Moques; les deux sièges d'or enrichis de pierreries, qu'il exécuta pour Clotaire II ; on pouvait voir encore plusieurs de ces ouvrages en 1789. Il contribua aussi pour une grande part à l'érection de plusieurs monuments religieux.
Éloi avait un disciple, saint Titouan le Suève, qu'il avait racheté de l'esclavage et formé à la vie chrétienne : il est mort martyr.
Saint Éloi est généralement considéré comme le saint patron des ouvriers qui se servent d'un marteau, et plus précisément des orfèvres, graveurs, forgerons, chaudronniers, horlogers, mineurs, taillandiers, batteurs d'or, doreurs, tisseurs d'or, monnayeurs, serruriers, cloutiers, fourbisseurs, balanciers, épingliers, aiguilliers, tireurs de fils de fer, ferblantiers, lampistes, loueurs de voiture, voituriers, cochers, vétérinaires, selliers, bourreliers, maréchaux-ferrants, charrons, carrossiers, charretiers, éperonniers, maquignons, fermiers, laboureurs, valets de ferme, pannetiers, vanniers, bouteillers, plonchoyeurs.
[modifier] Légendes autour de saint Éloi
- Saint Éloi est resté célèbre au travers de la comptine Le bon roi Dagobert.
- Saint Éloi est aussi réputé pour avoir chassé des géants au carnaval de Dunkerque.
- On raconte qu'il poursuivait les païens avec un crucifix doré en leur criant des mots en latin pour les distraire.
- On raconte qu'il professait que Dieu avait fait des pauvres pour que les riches puissent racheter leurs péchés.
- De nombreuses légendes ont courut en Allemagne, en Belgique et dans le Nord de la France sur l'évêque-orfèvre. L'une d'elles, d'origine allemande, voudrait expliquer pourquoi Eloi fut le patron de tant de corporations[3] et n'est pas tout à fait à son honneur.
A l'en croire, Eloi, simple maréchal-ferrant, s'était installé à son compte et avait accroché à sa porte une enseigne ainsi conçue : « Eloi. Maître sur maître. Maître sur tous ». Considérant que ce « Maître sur tous » était un défi à la puissance céleste, Jésus-Christ résolut de donner à Eloi une bonne leçon d'humilité.
Il s'habille donc comme un simple et pauvre forgeron et vient demander de l'embauche à l'atelier d'Eloi.
- Que sais-tu faire ? demande celui-ci.
- Je sais forger et ferrer aussi bien que qui que ce soit au monde.
- Que dis-tu de ce fer que je viens de forger ?
- Pas mal, mais on peut faire mieux.
Là-dessus, et sans attendre, Jésus forge un fer bien mieux fini, bien plus élégant que celui d'Eloi. Mais il ne s'arrête pas là. Ayant vu à la porte de la forge un cheval en attente d'être ferré, Jésus lui coupe la jambe, la met sur l'enclume, pose le fer, puis rattache la jambe au cheval qui paraît ne s'être aperçu de rien. Colère d'Eloi qui, pour relever ce défi, coupe une autre jambe du cheval et s'apprête à y poser un fer. Mais le cheval, cette fois, saigne, hennit de douleur, s'abat, et mourrait bientôt si Jésus n'arrêtait miraculeusement l'hémorragie avant de remettre la jambe en place. Du coup, Eloi capitule. Il prend son marteau et brise son enseigne en disant :
- Qui que tu sois, c'est toi le maître et c'est moi le compagnon.
Alors le Christ :
- Heureux celui qui s'humilie.
Eloi comprend enfin à qui il a affaire et se prosterne.
- Je te pardonne, dit le Christ, car je te crois guéri. Reste « Maître sur maître » ; mais souviens-toi que je suis seul « Maître sur tous ».
Il monte en croupe derrière le cavalier propriétaire du cheval dont la jambe avait été deux fois coupée. Et ils s'en vont. Eloi, qui n'est décidément pas au bout de ses surprises, comprend alors que ce cavalier était saint Georges.
Cette légende a au moins le mérite d'expliquer pourquoi Eloi apparaît sur de très anciennes gravures, tenant une jambe de cheval à la main. Mais elle ne peut être que postérieure au XIème siècle, époque où l'usage de ferrer les chevaux apparut en Occident.
- Une autre légende lie Eloi à la fondation de Dunkerque, et à Allowyn - ou Hallewyn -, un géant des Flandres à qui l'on prête beaucoup d'aventures :
Elle se passe au temps du bon roi Dagobert. Dunkerque, à l'époque, n'est rien. Ou presque : une petite église dans les dunes (Duine kercke : l'église des dunes) et quelques huttes au milieu d'une région marécageuse souvent recouverte par la mer (la côte ne fut vraiment fixée dans cette région qu'au XIIIème siècle, ce qui n'interdit pas d'autres inondations, parfois volontaires, pour raison de défense contre l'envahisseur, les dernières ayant été pratiquées lors de la Seconde Guerre mondiale). La ville importante, alors, en ces lieux durs et sauvages, était Mardyck, riche d'un port qui commerçait avec tous les pays du Nord. De l'Escaut à la Somme, on ne connaissait aucun port qui pût rivaliser avec Mardyck. Or, un beau matin, les habitants de Mardyck virent la mer couverte d'étranges barques à l'avant recourbé, où s'agitaient des guerriers immenses et chevelus.
Hélas, ces guerriers étaient affamés. A peine débarqués, ils se mirent à dévorer les enfants. Ils tuaient aussi les parents - ceux du moins qui n'avaient pu s'enfuir -, mais n'appréciaient pas leur chair qu'ils jugeaient sans doute trop dure. Ils n'accordèrent grâce qu'aux jolies filles, pour les raisons que l'on devine. Ces guerriers étaient les « Reuzes [4] », de hardis marins venus de très lointains pays du Nord. Ils jugèrent le site de Mardyck agréable, les maisons des bourgeois confortables, quoiqu'un peu étroites, et les provisions de leurs caves succulentes. Quelques habitants, réfugiés dans le château de la ville, faisaient mine de résister. Mais les Reuzes, qui n'avaient pas réussi à les vaincre, finirent presque par les oublier. Jusqu'au jour où - les meilleures choses ayant une fin les provisions vinrent à manquer. Les Reuzes, après une nouvelle attaque infructueuse contre le château, décidèrent d'effectuer des razzias dans le plat-pays d'alentour. Les voilà partis sous la direction d'un géant redouté, un féroce, un avide dont le seul nom glaçait de terreur tous les habitants de la région. Il s'appelait Allowyn.
Chaque semaine, des commandos de Reuzes menés par Allowyn allaient faire provision, de victuailles, d'enfants dodus et de jolies filles dans les quelques bourgades qui avaient résisté à leur fureur et à celle des flots : Wattanum. (aujourd'hui Watten), Burg-in-Brock (aujourd'hui Bourbourg), et enfin Duine Kercke.
La route de Duine Kercke allait être pour Allowyn une sorte de chemin de Damas. Un beau matin, alors qu'il y débarquait, il se prit les jambes dans les cordages de son navire et tomba sur le visage. Ce qui. eut pour effet de lui faire entrer son épée dans la poitrine. Tout le monde le crut mort, à commencer par les pêcheurs dunkerquois qui, réconfortés par ce coup du sort, se jetèrent sur les Reuzes. Ceux-ci, catastrophés, privés de leur chef, cherchèrent le salut dans la fuite. Les pêcheurs s'approchèrent ensuite du corps d'Allowyn : ainsi, c'était donc lui, le géant, le monstre qui avait fait périr leurs enfants et pleurer leurs femmes ! ...
Saint Eloi, justement, passait par là. Il aimait cette toute petite bourgade dont il avait converti les habitants et fait. construire la première église. Il y venait assez souvent, Et, le jour où Allowyn se transperça malencontreusement la poitrine, l'évêque-orfèvre venait de prendre un bain. Il se trouvait donc sur la côte. Voyant les pêcheurs affairés, il se précipita, les écarta, bénit Allowyn et le fit porter dans sa demeure.
On ne les revit plus de quinze jours. Personne n'osait rien dire ou demander, tant était grande l'autorité d'Eloi. Le seizième jour enfin, saint Eloi fit sortir le géant, guéri, et l'amena à l'église, où il le baptisa et le maria à la plus belle fille du pays. Allowyn s'y installa à demeure, devint le chef des habitants à qui il fit construire des remparts, des tours et des bâtiments.
Ainsi, selon la légende, naquit Dunkerque.
Cette légende ajoute que le géant, par sa force, sa ruse, sa piété, les relations qu'il avait avec les Reuzes, ses anciens compagnons, réussit à écarter de la nouvelle ville les fléaux qui s'abattaient sur tout le pays. Il vécut longtemps : cent ans, un mois, une semaine, un jour et une heure. Le dernier jour, il monta sur une tour, resta longtemps silencieux à regarder vers le nord d'où il était venu, puis il vida une coupe de vin, la lança dans les flots et. s'affaissa. En souvenir de lui, les habitants fabriquèrent un grand mannequin d'osier et construisirent une immense tour, à peu près de la même hauteur près de la principale église de la ville. Cette église fut dédiée à saint Eloi.
[modifier] Notes
- ↑ Son père s'appellait Eucher et sa mère Terrigie
- ↑ Vie de saint Eloi (Vita d'Eligius) par saint Ouen.
- ↑ Elle a été reprise par Louis du Broc de Segauge dans Les saints patrons des corporations, Paris, 1887
- ↑ Le géant de Dunkerque, un grand mannequin d'osier habillé en légionnaire romain et qui occupe une place importante dans le folklore local, s'appelle « Reuze papa ».
[modifier] Sources
- Paul PERDRIZET, Le calendrier parisien à la fin du Moyen-Âge, Paris 1933.
- « Éloi de Noyon », dans Marie-Nicolas Bouillet et Alexis Chassang (dir.), Dictionnaire universel d'histoire et de géographie, 1878 [détail des éditions] (Wikisource)
- Saint Eloi, Jacques Duquesne. Editions Fayard, 1985.