Abraham ibn Ezra
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Abraham ben Meir ibn Ezra, né vers 1090 à Tudèle, dans l'émirat de Saragosse, décédé vers 1165 à Calahorra, était rabbin, poète, grammairien, traducteur, commentateur, philosophe, mathématicien et astronome. Il fut l’un des plus éminents érudits juifs de l’Âge d’Or espagnol, et l'une des sources d'inspiration de Baruch Spinoza.
Sa vie est mal connue, sinon par les relations qu’il entretenait avec Rabbenou Tam et Juda Halevi (dont certains pensent qu’il fut le beau-père d’Ibn Ezra). Il rencontre Juda Halevi à Grenade, puis voyage avec lui à travers l’Espagne musulmane et l’Afrique du Nord à partir de 1109.
Après la mort de Juda au Caire, il entreprend ses pérégrinations aux alentours de 1140. Dans le plus grand dénuement, il se rend à Rome, Lucques, Mantoue et Vérone. Il écrit des poèmes, des commentaires sur les Prophètes et des ouvrages de grammaire. Allant d’une communauté juive à l’autre, il se rend en Provence puis vers le nord de la France, où il produit une série de commentaires sur le Pentateuque, des traités d’astrologie, des commentaires sur le livre de Daniel, sur les Psaumes et les Prophètes mineurs. En 1158, il se rend à Londres et à Oxford, puis peut-être à Narbonne en 1161. Il disparaît mystérieusement vers 1160 et meurt peut-être en Israël en 1164.
On raconte qu’au cours de ses voyages, il fut capturé par des pirates qui le menèrent à bon port après qu’il eut battu le capitaine aux charades. Il est en tout cas certain qu’il composa la plupart de ses œuvres durant ces voyages, et qu’il raviva l’intérêt pour les études partout où il passa.
Sommaire |
[modifier] Philosophie religieuse
Néoplatonicien par excellence, il considère que :
- seul le monde inférieur fut créé, le monde supérieur et les anges étant coéternels à Dieu
- Dieu a tout fait et Est tout, mais n'a pas de forme ni matière
- l'âme humaine provient d'une substance spirituelle, l'Âme du monde, et peut, si elle en est capable, devenir immortelle en se réintégrant à cette Âme universelle
- Dieu ne connaît que les espèces, pas les individus
- la providence divine, qui elle aussi ne s'adresse qu'aux espèces, est médiée par les corps célestes, mais les individus ayant développé leur âme et leur intellect peuvent prévoir les influences néfastes causées par les sphères célestes, et en conséquence les éviter.
Spinoza l'a fait connaître comme un de ses modèles, et il fait effectivement le premier montre de critique vis-à-vis des textes bibliques, estimant, sur base strictement textuelle, que la Torah n'a pu être rédigée par Moïse seulement.
Il n'est toutefois pas le libre penseur qu'on a voulu imaginer et, bien que frôlant lui-même l'accusation d'hérésie à plusieurs reprises, s'insurgea contre ceux qui lui semblaient porter atteinte aux fondements de la tradition et des rites (comme l'interprétation du Rashbam sur Shabbat)
[modifier] Ses œuvres
[modifier] Commentaires bibliques
Son œuvre la plus connue et à laquelle il doit sa réputation est sans conteste son commentaire biblique, qui a engendré une abondante littérature de surcommentaires à l'instar du commentaire de Rachi, sans toutefois l'égaler.
Le commentaire existe en version manuscrite et imprimée. Le commentaire sur l'Exode y est inclus, bien qu'il fût un ouvrage en soi, achevé en Provence en 1153.
Le commentaire complet, appelé Sefer ha-yashar, fut terminé par Ibn Ezra peu avant sa mort. Il entama une seconde version, qu'il ne put achever.
Les Mikraot Gdolot incluent également les commentaires d'Ibn Ezra sur Isaïe, les Prophètes mineurs, les Psaumes, Job, Esther, Ruth et Daniel. Il est le premier à avoir découvert deux auteurs différents dans le Livre d'Isaïe.
Les commentaires sur les Proverbes et les livres d'Ezra et Néhémie qui lui sont attribués sont en réalité de la plume de Moïse Kimhi.
Un autre commentaire sur les Proverbes qui lui a été attribué par Driver en 1881 et Horowitz en 1884 n'est pas davantage de lui, raison pour laquelle on le nomme "pseudo-Ibn Ezra".
Il écrivit également sur le Cantique des Cantiques et d'autres livres bibliques, ainsi qu'il le mentionne lui-même, mais ces travaux ne nous sont pas parvenus.
Voir aussi : Commentaire biblique (Judaïsme)
[modifier] Grammaire hébraïque
- « Moznayim » (1140), explication sur les termes utilisés dans la grammaire hébraïque, bientôt plagié par Judah Hadassi dans son « Eshkol ha-kofer » (1148), sans référence à ibn Ezra ;
- Traduction des œuvres de Khayyudj en Hébreu (ed. Onken, 1844) ;
- « Sefer ha-yesod, » ou « Yesod dikduk », n'existe que sous forme manuscrite ;
- « Tzakhot » (1145), sur la correction, contenant aussi un survol de la métrique en hébreu post-biblique. Réputé être son meilleur ouvrage de grammaire ; 1re éd. 1546 ;
- « Safah berurah », 1re éd. 1830 ;
- un court exposé grammatical, au début de son commentaire inachevé sur le livre de la Genèse.
Voir aussi : Grammaire hébraïque
[modifier] Travaux « mineurs » de grammaire et d'éxégèse
- « Sefat yeter », défense de Saadia Gaon contre les arguments de son élève Dunash ben Labrat, qu'ibn Ezra a découvert et ramené d'Égypte. Publications: Bislichs 1838, Lippmann 1843 ;
- « Sefer ha-shem, » ed. Lippmann, 1834 ;
- « Yesod mispar », petite monographie sur les chiffres, éd. Pinsker (1863), contenu dans la dernière partie de son livre sur les systèmes de ponctuation hébreu et babylonien ,
- « Iggeret shabbat », composé aux alentours de 1158, éd. Luzzatto, in Kerem Ḥemed IV, pp. 158 sq.
- « Yesod mora we-sod ha-torah » (1158), sur la division des commandements bibliques et leur essence ; 1re éd. 1529.
[modifier] Mathématiques, Astronomie et Astrologie
- « Sefer ha-ekhad, », particularités des chiffres de 1 à 9 ;
- « Sefer ha-mispar » ou « Yesod mispar », ouvrage d'arithmétique ;
- « Lukhot », calendriers astronomiques ;
- « Sefer ha-'ibbur », sur le calendrier, éd. Halberstam, 1874 ;
- « Keli ha-nekhoshet », réflexions sur l'astrolabe, éd. Edelmann, 1845 ;
- « Shalosh she'elot », réponse à trois questions de David Narboni sur la chronologie ;
- Traduction de travaux de Mashallah (un astrologue) : "She'elot" et "Kadrut" (Steinschneider, Hebr. Uebers., pp. 600-603).
Le cratère lunaire "Abenezra" est nommé en son hommage.
[modifier] Le Poète
Le style d'ibn Ezra est en lui-même poétique. L'auteur du commentaire s'exprime dans une langue hébraïque idiomatique, car il pense en hébreu.
Néanmoins, il existe une anthologie de poèmes authentiques (dîwân) d'Ibn Ezra, d'inspiration religieuse ou satirique.
Sa poésie est amère mais assez ironique. Ainsi, pour justifier son indigence, il dit que s'il vendait des chandelles, le soleil, rien que pour l'ennuyer, brillerait la nuit, et que de même, le jour où l'on ne mourra plus viendra peut-être lorsqu'il essayera de vendre des suaires.
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