Doctrine de la guerre juste

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La doctrine de la guerre juste est un modèle de pensée et un ensemble de règles de conduite morale définissant à quelle condition la guerre est une action moralement acceptable. La doctrine s'intéresse plus particulièrement à la guerre préventive et la notion de preuve du casus belli n'y a que peu de place.

Sommaire

[modifier] Histoire de la notion

Les premières interrogations d'ampleur sur cette doctrine furent le fait de Cicéron.

Son interrogation est reprise par des auteurs catholiques comme Saint Augustin, Francisco de Vitoria, Thomas d'Aquin et son disciple Francisco Suárez.

Thomas d'Aquin exige trois conditions :

  1. auctoritas principis : la guerre ne peut relever que de la puissance publique sinon elle est un crime . L'auctoritas principis s'oppose à la décision individuelle appelée persona privata;
  2. causa justa : la cause juste ; c'est cette dernière notion qui donne le plus lieu à interprétation ;
  3. intentio recta : l'intention ne doit pas être entachée de causes cachées mais uniquement dans le but de faire triompher le bien commun.

A la fin du XIIe, Johannes Faventinus associe l'idée de guerre juste pour la défense de la patria avec celle de ratio (ou « raison d'Etat ») [1]. Elle est aussi légitimée pour défendre l'Eglise (le status Ecclesiae) s'il s'agit d'une croisade contre l'infidèle ou contre un Hohenstaufen [1].

Chez Francisco Vitoria apparaissent tous les thèmes principaux de l'école de Salamanque : à savoir que la guerre représente un des pires des maux et que l'on ne peut y recourir que pour éviter un mal plus grand. La guerre préventive contre un tyran susceptible d'attaquer fait partie des exemples reconnus par cette école. Toutefois, toutes les formes de dialogue doivent être utilisées au préalable et la guerre ne peut être déclenchée que comme ultime recours.

À partir de cet instant, la question essentielle est de savoir s'il existe des voies de droit évitant de recourir à la force.

Il n'est pas étonnant de trouver de nombreux chrétiens à l'origine du problème de conscience posé par la nécessité d'intervenir : Ignace de Loyola parlait du magis à propos de l'interrogation du décideur, puisque entrer en guerre est une décision très lourde de conséquence pour un chrétien tenu de respecter le cinquième commandement (« Tu ne tueras point »).

Le chrétien, de par sa foi, connaît la hantise de savoir s'il agit conformément à cette règle. Ambroise, dans De Officiis I,29 précisait qu'il y avait deux manières de pécher contre la justice :

« [...] l'une , c'est de commettre un acte injuste, l'autre c'est de ne pas venir au secours de la victime d'un injuste agresseur. »

Dans le domaine du droit pénal cette notion se retrouve dans les sanctions afférentes à la non-assistance à personne en danger.

[modifier] À l'époque contemporaine

Michael Walzer s'avère être le principal théoricien de cette doctrine.

La théorie de la guerre juste peut être divisée en trois catégories :

  1. Le « Jus ad Bellum  » : concerne particulièrement les causes de la guerre.
  2. Le « Jus in Bello  » : concerne la justice du comportement des différents intervenants pendant le conflit.
  3. Le « Jus post Bellum  » : concerne la phase terminale et les accords de paix qui doivent être équitables pour toutes les parties.

La synthèse de ces trois étapes permet de dégager les lignes suivantes :

La guerre pour être juste, doit être engagée en dernier ressort. Toutes les possibilités non violentes doivent au préalable avoir été examinées.

La question de l'autorité légitime se pose lorsque le Conseil de sécurité des Nations unies est bloqué par la volonté d'une partie d'exercer son droit de veto.

La probabilité de succès doit être plus forte que les dommages imposés. Ce point est certainement l'un des plus difficiles à évaluer puisqu'entrant dans le cadre du calcul des probabilités.

La violence engagée dans le conflit doit être proportionnelle au dommage infligé et les populations civiles doivent être autant que possible distinguées des agresseurs militaires. Là encore, se présente une nouvelle difficulté avec les interventions de type guérillas où il est difficile de faire la distinction entre civils et militaires.

Le but ultime de l'intervention armée doit être de rétablir la paix.

[modifier] Position actuelle de l'Église catholique

Dans un entretien avec Wolf Blitzer en 2003, l'alors cardinal et actuel pape Joseph Ratzinger a fait remarquer que la notion de guerre juste était complètement absente du catéchisme de l'Église catholique. L'Église ne soutient a priori aucune guerre dans le monde et encourage tous les efforts de paix.

Toutefois, la Doctrine sociale de l'Église donne des règles strictes, et notamment que pour être licite, l'usage de la force doit répondre à :

  • ce que le dommage infligé par l'agresseur soit durable, grave et certain (Justification)
  • ce que tous les autres moyens d'y mettre fin se soient révélés impraticables ou inefficaces (Negociation)
  • ce que soient réunies les conditions sérieuses de succès (Interdiction des attaques suicide)
  • ce que l'emploi des armes n'entraîne pas des maux et des désordres plus graves que le mal à éliminer (Atome).

Parmi les références notables à ce sujet :

[modifier] Voir aussi

[modifier] Notes

  1. ab Gaines Post, « Ratio publicae utilitatis, ratio status et « raison d’Etat » : 1100-1300 », pp.13-90 (cf. en part. pp.38-39) in Christian Lazzeri et Dominique Reynié (dir.), Le pouvoir de la raison d’état (PUF, 1992)

[modifier] Bibliographie

  • Michaël Walzer, Guerres justes et injustes, Belin, 1999
  • Michaël Walzer, Morale maximale,morale minimale , Bayard, 2004
  • Kenneth N. Waltz, Theory of International Relations, 1975
  • Nicolas Offenstadt, «Guerres justes et usages du passé», Cahiers de la Villa Gillet, « Penser la guerre aujourd’hui », n° 16, 2002, p. 121-130.
  • Pierre Hassner, Justifier la guerre, Presses de Sciences Po, 2005

[modifier] Articles connexes

[modifier] Lien externe

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