Armée byzantine
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L'armée byzantine était le corps militaire principal des forces armées byzantines, servant côte à côte avec la marine byzantine. Descendant direct des légions et de la marine romaine de l'ancien empire romain, l'armée byzantine maintint un niveau similaire de discipline, de prouesse stratégique et d'organisation. Pour une grande part de son histoire, l'armée byzantine fut la plus puissante et la plus performante force militaire de toute l'Europe. La tactique militaire byzantine commença à évoluer de manière autonome après la chute de l'empire romain d'occident et la disparition des légions romaines.
[modifier] Soldats étrangers et mercenaires
Pendant ses 1,123 années d'existence, depuis la fondation de Constantinople comme capitale de l'empire le 11 mai 330, jusqu'à la prise de la cité par les Ottomans le 29 mai 1453, l'armée byzantine recruta des troupes de diverses nationalités et groupes ethniques. Souvent, ces troupes complétaient ou assistaient les forces régulières de l'empire; parfois, elles formaient même la plus grande part de l'armée byzantine. Mais pour la plupart de la longue histoire de l'armée byzantine, les soldats étrangers et militaires reflétaient la prospérité et la puissance de l'empire byzantin; pour l'empereur qui était capable de rassembler des armées de tous les coins du monde connu, c'était effectivement une chose formidable.
Les troupes étrangères durant la période tardive de l'empire romain étaient connues sous le nom de foederati (les «alliés» ou les «fédérés»), et continuaient à être connues comme telles jusqu'aux environs du IXe siècle, bien que le titre qu'elles tenaient ait été hellénisé en Phoideratoi (Gr.Φοιδεράτοι). A partir de ce moment, les troupes étrangères (principalement mercenaires) furent connues comme Hetaireiai (Gr. Εταιρείαι, les «Compagnons») et recrutées le plus fréquemment dans la garde impériale. Cette force fut à son tour divisée en Grands Compagnons (Μεγάλη Εταιρεία), Compagnons Moyens (Μέση Εταιρεία), et Compagnons Mineurs (Μικρά Εταιρεία), commandés par leurs Hétaïréïarches respectifs. Ceux-ci pourraient avoir été divisés sur une base religieuse séparant les sujets chrétiens, les étrangers chrétiens, et non-chrétiens respectivement. [1]
En outre, durant la période comnénienne, les unités mercenaires vont simplement être divisées par l'ethnie et seront nommées d'après leurs pays d'origine: les Inglinoi (Anglais), les Phragkoi (Francs), les Skythikoi (Scythes), les Latinikoi (Latins), etc. Même les Éthiopiens ont servi durant le règne de Théophile. Ces unités mercenaires, particulièrement les Skythikoi, furent aussi souvent utilisées comme force policière à Constantinople.
Le plus célèbre de tous les régiments byzantins fut la légendaire garde varangienne. Cette unité trouve ses racines dans les six mille Rus' envoyés à l'empereur Basile II par Vladimir de Kiev en 988. L'habileté terrible de ces barbares nordiques manieurs de haches, et leur intense loyauté (achetée avec beaucoup d'argent), les établissaient comme un corps d'élite, qui bientôt accéda au grade de garde personnelle de l'empereur. On le voit dans le titre même que porte leur commandant, l'akolouthos (Ακόλουθος, "Acolyte" de l'empereur). Tout d'abord les Varanges furent surtout d'origine russe, mais par la suite, de nombreux Scandinaves et Anglo-Saxons (après la conquête normande de l'Angleterre) entrèrent dans la garde. La garde des Varanges se distingua à la bataille de Beroia en 1122, et était présente lors de la bataille de Sirmium en 1167, durant laquelle l'armée byzantine écrasa les forces du royaume de Hongrie. On suppose que la garde des Varanges a été congédiée après le sac de Constantinople par les forces de la Quatrième croisade en 1204; ils furent la dernière unité à avoir défendu avec succès une partie de la ville contre l'assaut des croisés.
[modifier] Autres types de troupes
[modifier] Les Cataphractaires
Les Byzantins maintinrent la tradition d'une cavalerie lourdement armée et cuirassée durant tout le Moyen Âge. Le terme de cataphracte ( du grec κατάφρακτος, kataphraktos) était celui dont se servaient les Grecs et les peuples de langue latine pour désigner leur cavalerie lourde. Historiquement, le cataphractaire était un cavalier lourdement armé et cuirassé qui lançait les assauts depuis la plus ancienne antiquité jusqu'au haut Moyen Âge. A l'origine, le terme de cataphracte renvoyait à un type de cuirasse qui couvrait la totalité du corps du cavalier et de celui de son cheval. Par la suite, le terme était utilisé pour désigner l'ensemble de la troupe. Les cataphractaires était à la fois hardis et disciplinés. Hommes comme chevaux étaient cuirassés; les cavaliers portaient chacun une lance, un arc et une masse. Ces troupes se déplaçaient plus lentement que la cavalerie légère, mais leur action sur les champs de bataille, en particulier sous l'empereur Nicéphore Ier, était dévastatatrice.
[modifier] La cavalerie
La cavalerie byzantine est l'héritière des légions romaines disciplinées et cuirassées. Ordinairement armés d'arcs, de lances et d'épées, les cavaliers étaient idéalement adaptés pour les combats dans les plaines de l'Anatolie et du Nord de la Syrie, qui, à partir du VII siècle, constituaient le terrain essentiel des luttes contre les forces musulmanes. Bien que moins lourdement armés que que les chevaliers occidentaux, ils étaient cependant très efficaces à la fois contre les Arabes et les Turcs à l'est, et contre les Hongrois et les Petchenègues à l'Ouest.
[modifier] L'infanterie
La tradition militaire de l'empire byzantin trouve son origine dans la période du bas empire, et ses armées ont toujours compris des fantassins professionnels. Bien qu'ayant varié en importance relative au cours de l'histoire de l'armée byzantine, l'infanterie lourde était une composante importante de l'armée, notamment sous Basile II. Ces troupes portaient à l'origine des cottes de maille, de larges boucliers, et étaient armées d'épées et de javelots. Sous les empereurs guerriers les plus compétents, tel Basile II, elles figuraient parmi les infanteries les plus efficaces du monde.
[modifier] Les pronoiaires
Les troupes pronoiaires apparurent au XIIIe siècle, en particulier durant le règne de l'empereur Manuel Ier Comnène (1143-1180). Il s'agissait de soldats payés par octroi de terres au lieu de réception d'une solde en argent, mais ils n'opéraient pas au sein du vieux système des thèmes de la période mésobyzantine. Les pronoiai consistaient essentiellement en un droit de taxer les citoyens qui vivaient à l'intérieur des terres concédées (les parèques). Les pronoiaires (ceux à qui avait été concédée cette pronoia) devinrent alors en quelque sorte des collecteurs d'impôts, qui étaient autorisés à garder une partie des revenus qu'ils prélevaient. Ces hommes ont été par conséquent souvent comparés aux chevaliers occidentaux: en partie soldats, en partie des dirigeants locaux. Il est important néanmoins de noter que l'empereur demeurait le propriétaire légal des terres des pronoiaires. Cavaliers pour la plupart, les pronoiaires étaient équipés de cottes de mailles, de lances et de bardes pour leurs chevaux. Manuel rééquipa sa cavalerie lourde à la façon occidentale durant son règne. Il est fort probable que beaucoup de ces troupes étaient des pronoiaires. Ces troupes devinrent fréquentes après 1204, au service de l'empire de Nicée, à l'Ouest de l'Asie mineure.
[modifier] Armées de l'époque protobyzantine
Etant donné que l'empire byzantin (en grec Βυζαντινή Αυτοκρατορία, ou plus exactement Βασιλεία Ρωμαίων) était la continuation de l'empire romain, l'armée byzantine était héritée de l'ancienne armée romaine. Les provinces étaient auparavant sous juridiction civile, avec des gouverneurs nommés par le sénat romain ou par l'empereur romain lui-même; l'armée était constituée d'une trentaine de légions basées le long des frontières inhabitées de l'empire. L'ancien système romain dura jusqu'au début du VIIe siècle.
[modifier] Réformes de l'armée sous Dioclétien et Constantin
L'empire romain d'Orient date de la création de la Tétrarchie (sorte de quadrumvirat) par l'empereur Dioclétien en 293. Son projet pour la succession ne survit pas à sa mort, mais sa réorganisation de l'armée demeura pendant des siècles. Plutôt que de maintenir des légions traditionnellement fortes en infanterie, Dioclétien la réforma en la divisant entre limitanei (sur les frontières) et comitatenses (sur les champs de bataille). Il y eut une expansion de l'importance de la chevalerie, bien que l'infanterie demeure la composante essentielle des armées romaines, contrairement à l'idée générale. Ainsi, en 478, une armée de limitanei d'Orient se constituait de 8.000 cavaliers et 30.000 fantassins et on peut évaluer l'armée dont disposait en 357 l'empereur Julien l'Apostat à Strasbourg, à 10.000 fantassins et 3.000 cavaliers. Mais l'importance de la cavalerie augmenta chez les officiers, bien que leur nombre n'augmenta pas, et sous Justinien, même leur nombre augmenta. L'introduction de la selle et de l'étrier au haut Moyen Âge, bien que l'on ne sache ni le lieu ni la date de ces inventions, participèrent sans doute à cette augmentation, de même que l'élevage de plus en plus étendu de chevaux assez solides pour supporter un homme en armure, sur le plateau iranien.
Les troupes de garde-frontières, ou limitanei étaient chargées de défendre le limes, ligne de fortifications le long des frontières de l'empire. Les troupes de combat, les comitatenses, en revanche, demeuraient à l'intérieur de l'empire et devaient pouvoir se déplacer rapidement là où l'on avait besoin d'elles, pour des opérations défensives ou offensives; elles servaient aussi au besoin d'armée pour vaincre les usurpateurs. Les troupes de combat étaient bien entretenues, et avaient préséance sur les limitanei tant pour la solde que pour le ravitaillement.
La cavalerie représentait environ un tiers des troupes, mais parce qu'elle était formée de troupes plus petites, elle ne représentait en réalité qu'un quart des effectifs des armées romaines. La cavalerie lourde représentait la moitié de cette cavalerie, et portait divers noms: les scutarii (littéralement les porteurs de boucliers), les promoti ou les stablesiani, pour n'en nommer que quelques uns. Ces cavaliers lourds étaient ordinairement armés d'un javelot ou d'une lance, ainsi que d'une épée, et portaient une cotte de maille. Quelques-uns avaient un arcs, mais étaient sensés protéger la charge et non combattre par eux mêmes. Parmi ces armées de combat, 15% étaient des cataphractaires ou des clibanari, cavalerie lourdement armée, qui utilisaient des tactiques de choc. Figuraient aussi des archers montés (Equites sagitarii), et différents types de cavalerie légère. La cavalerie légère était nombreuse parmi les limitanei, et constituait des troupes très utiles pour les patrouilles. L'infanterie des comitatenses était divisée en régiments d'environ 1.200 hommes, les légions. Il s'agissait toujours de la traditionnelle infanterie lourde, dont les soldats portaient chacun un javelot, une épée, une armure et un casque. Mais désormais, chaque régiment était accompagné d'un détachement d'archers et de quelques tirailleurs. Au besoin, les fantassins pouvaient abandonner leur armure pour pouvoir combattre plus agilement, comme le fit Modarès, si l'on en croit Zosime, durant la guerre contre les Goths des années 370. Les légions étaient dirigées par un tribun, et allaient par paire, de même que les troupes de cavalerie, sous l'autorité d'un comte. Ces brigades de deux légions étaient sans doute seulement des unités tactiques et stratégiques, car on n'a gardé aucune trace d'un quelconque état-major de brigade.
Cependant, on a peu de renseignement sur les limitanei. Les légions traditionnelles, les cohortes et les ailes de la cavalerie (alae) ont survécu à ces réformes, et de nouvelles unités ont été créées dans la cavalerie, les troupes auxiliaires (auxilia) et les vexillations. Il est possible que l'infanterie des garde-frontières ait été équipée plus légèrement que celle des troupes de combat, mais là encore, on n'en a gardé aucune preuve. Les limitanei était moins bien payés que les comitatenses, et recrutés localement, contrairement à eux. En conséquence, leur efficacité était moindre. Ils étaient néanmoins en première ligne, et comptaient davantage d'incursions et attaques. On peut donc penser que leur expérience du combat était généralement plus grande (hormis lorsque les comitatenses partaient pour de longues campagnes), bien que cette expérience ne s'étendît pas aux batailles rangées ou aux sièges.
Les unités des scholes (en latin Scholae protectores domestici) et l'obsequium, escorte impériale, constituaient la garde personnelle de l'empereur, qui fut créée pour remplacer la garde prétorienne dissoute par Constantin Ier.
Aux IVe et Ve siècles, les légions n'étaient plus celles de la République ou du Haut-Empire, et elles étaient essentiellement, voire exclusivement constituées de cavaliers, et tendaient à avoir un effectif bien inférieur à celui de la légion augustinienne, qui comportait 5.000 hommes en moyenne.
[modifier] L'armée sous Justinien et ses successeurs
[modifier] Les armées à l'époque mésobyzantine
[modifier] Les thèmes
- Article principal: Thème
Ordinairement attribués à Heraclius, mais en réalité fondés à l'initiative de son successeur, Constant II, sur le modèle des exarchats d'Italie et d'Afrique, les thèmes (en grec θέματα) étaient les circonscriptions administratives de l'empire. Ils étaient dirigés par un général, le stratège (en grec στρατηγός), qui cumulait à la fois le pouvoir civil et le pouvoir militaire. L'origine du terme est obscure. Il pourrait venir du turc toumen, qui désignait une division de 10 000 hommes, et qui serait entré dans l'empire par l'intermédiaire des Khazars.
Les cinq premiers thèmes étaient tous situés en Asie mineure, et avaient pour rôle de faire face au djihad arabe, qui avait déjà causé la perte des provinces syrienne et égyptienne. Il s'agissait des thèmes:
- des Arméniaques (Αρμενιακόν), constitué autour de l'armée d'Arménie par l'empereur Justinien II, et situé à l'Est de l'Anatolie, depuis la Cappadoce jusqu'à la Mer noire et l'Euphrate;
- des Anatoliques (Ανατολικόν), constitué autour de l'armée de l'Est, et comprenant les possessions byzantines du centre et du Sud-Est de l'Asie mineure;
- de l'Opsikion (Οψίκιον), constitué autour de l'Obsequium, troupe armée chargée de la protection de l'empereur, et comprenant la Bithynie et la Paphlagonie;
- des Thracésiens (Θρακήσιον), constitué autour de l'armée de Thrace, et comprenant le Sud-Ouest de l'Asie mineure autour de l'Ionie;
- des Caravisiens (Καραβησιάνων), le "thème des navires" en Pamphylie et à Rhodes, qui avait la charge de repousser les attaques des flottes arabes.
Dans chaque thème, les hommes choisis comme soldats se voyaient offrir des terres pour nourrir leur famille, et pour s'équiper, les pronoiai(πρόνοια). La population des quatre premiers thèmes était dirigée vers l'armée; ainsi, le thème des Caravisiens recrutait les hommes pour la flotte byzantine, bien que la construction navale fût subventionnée (de façon intermittante) par différents offices du Trésor impérial. Ce modèle d'organisation en thèmes fut rapidement étendu à tout l'empire, les régions de l'Ouest comprises.
A la suite de révoltes aristocratiques que venait renforcer la grande taille de ces circonscriptions, Léon III l'Isaurien, Théophile, et Léon VI le Sage prirent des mesures pour affaiblir les thèmes en les divisant en thèmes plus petits, et en répartissant le contrôle des armées dans chaque thèmes entre des tourmes. De même, au lieu d'étendre les thèmes existants sur les terres qu'il conquéraient, les empereurs de la dynastie macédonienne renaissante préférèrent souvent créer de nouveaux thèmes. A l'époque de la rédaction du De Thematibus (Xe siècle), Constantin VII Porphyrogénète établit une liste de trente-huit thèmes.
La Sicile fut définitivement abandonnée aux Arabes au début du règne de Constantin VIII, en 905, et Chypre était un condominium administré conjointement avec le califat musulman jusqu'à sa reconquête par Nicéphore II Phocas en 965. Constantinople, quant à elle, était sous la domination d'un éparque ( autrefois appelé préfet de la ville, en latin, praefactus urbis) et était protégée par de nombreuses tagmata et forces de police.
Les tourmarques, placés sous la direction des chefs de thème, les stratèges, avaient la charge de deux à trois divisions armées, qui correspondaient aussi à des subdivisions territoriales appelée les tourmes. Sous leur commandement se trouvaient les drongaires, eux-mêmes à la tête de territoires appelés drongoi, dont chacun était constitué d'un millier de soldats. Sur le champ de bataille, ces unités étaient divisées en bandes, ou banda (singulier: bandon) de 300 hommes environ, bien que parfois réduites à tout juste un peu plus de 50 hommes. Là encore, la charge de soumettre les révoltes éventuelles incombait à ces subdivisions.[2]
Le tableau suivant illustre la structure thématique telle qu'on pouvait la voir dans le thème des Thracésiens entre 902 et 936.
Nom | Effectif | Nombre d'unités subordonnées | Chef de troupe |
---|---|---|---|
Thème | 9.600 | 4 Mérè | Stratège |
Tourma, Méros | 2.400 | 6 Drongoi | Tourmarque |
Drongos | 400 | 2 Banda | Drongaires |
Bandon | 200 | 2 Centuries | Comte |
Centurie | 100 | 10 Contubernia | Hécatontarque |
50 | 5 Contubernia | Pentecontarque | |
Contubernium | 10 | 1 Avant-garde* + 1 Arrière-garde* | Décarque |
Avant-garde* | 5 | aucune | Pentrarque |
Arrière-garde* | 4 | aucune | Tétrarque |
- Note: ces termes sont des traductions directes en français.
[modifier] Les tagmata impériales
- Article principal: Tagma
Les tagmata (en grec τάγματα, "bataillon") était l'armée permanente de l'empire, ordinairement basée à Constantinople ou dans les alentours, même si dans les derniers temps des détachements furent envoyés dans les provinces. Ce qu'il restait des armées de Dioclétien devint les premières tagmata, qui furent converties en armée de thème sous les Héraclides. A peu près à la même époque, quelques tagmata furent formées qui constituaient des sortes de clubs sociaux pour les grands nobles de la capitale. Ainsi, Justinien lui-même se serait amusé en intégrant l'une de ces unités, les scholes, dans de faux exercices de déploiement armé, causant par là la panique dans la classe la plus élevée des soldats aristocrates, qui n'avaient aucun désir d'abandonner la sécurité de Constantinople pour l'inconfort et le danger d'une campagne militaire imminente.
Après les premières révoltes des armées thématiques, les empereurs se souvinrent de l'utilité de posséder une armée de campagne loyale, et les tagmata furent placées sous la direction d'une administration séparée, leur équipement et leur entraînement furent améliorés, et elles furent désormais utilisées jusqu'à la fin de l'empire.
Les quatre tagmata les plus prestigieuses étaient, dans l'ordre:
- Les Scholes (en grec Σχολαί, "les écoles"), descendantes directes des gardes impériales Constantin;
- Les Excubites (en grec Εξκούβιτοι, "les vigiles"), établis par Léon I;
- Les Arithmoi (en grec Αριθμός, "les nombres") ou Vigla (en grec Βίγλα, la "veille"), établis sans doute entre la fin du Ve siècle et le début du VIe siècle; et
- Les Hicanates (en grec Ικανάτοι, "Les capables"), établis par l'empereur Nicéphore I.
Tous ces bataillons étaient des unités de cavalerie, comprenant chacune entre 1.000 et 6.000 hommes. Quatre mille hommes semble avoir été leur nombre moyen. Les Noumeroi (en grec Νούμεροι, "Garçons des bains", appelés ainsi pour la situation de leur base dans la ville), les Optimates (en grec Οπτιμάτοι, "les meilleurs"), et la tagma ton Teikhon (en grec Τειχών, "des murs") étaient des tagmata d'infanterie. La Vigla et les Noumeroi aidaient à la police de Constantinople; la tagma des murs, comme son nom l'indique, défendait les murs de Théodose et était plus généralement responsable de la défense de la capitale.
En plus de ces unités plus ou moins stable, quelques tagmata éphémères furent formées en tant qu'unités dévouées aux empereurs. Michel II créa les tessarakontarioi, unité spéciale de marine, et Jean Ier Tzimiskès fonda les Athanatoi (en grec Αθάνατοι, les "Immortels") d'après l'ancienne unité perse.
Les unités tagmatiques étaient dirigées par un domestique, qui avait pour lieutenant le topotérétès, hormis pour la Vigla, commandée par un drongaire. Les banda qui formaient ces unités étaient dirigés par un comte (komes en grec). Le domestique des Scholes, commandant du régiment des Scholes, devint peu à peu de plus en plus important, jusqu'à devenir l'officier le plus important au Xer siècle.
[modifier] L'armée des Comnène
[modifier] Instauration et succès
A l'avènement de la dynastie Comnène, en 1081, l'empire byzantin avait été réduit à sa plus faible extension depuis le début de son histoire. Cerné par des peuples hostiles et ruiné financièrement par une longue période de guerre civile, l'empire semblait destiné à un avenir bien sombre. Mais, grâce à une politique hardie et déterminée, et à des années de campagnes militaires, Alexis, Jean et Manuel Comnène parvinrent à restaurer le pouvoir de l'empire en mettant en place une nouvelle armée sur de nouvelles bases. Cette force armée était à la fois professionnelle et disciplinée. Elle était constituée de puissantes unités telles que les gardes des Varanges et des Immortels (unité de cavalerie lourde), stationnées à Constantinople, et d'autres unités légères des provinces. Ces dernières incluaient la cavalerie des cataphractaires de Macédoine, Thessalie et Thrace, et d'autres forces régionales des côtes asiatiques de la Mer Noire.
Sous Jean II, une unité macédonienne fut maintenue, et les nouvelles troupes de nation byzantine étaient désormais recrutées dans les provinces. L'Asie mineure commençant à prospérer sous les règnes de Jean II et Manuel Ier, on recruta davantage de soldats dans les provinces asiatiques de Néokastra, Paphlagonie et Séleucie (au Sud-Est). Des soldats furent aussi recrutés parmi les peuples vaincus, tels les Petchénègues (cavaliers archers), ou les Serbes, qui étaient utilisés comme colons stationnés à Nicomédie. Les troupes locales étaient organisées en unités régulières et basées à la fois dans les provinces asiatiques et européennes. Les armées comnèniennes étaient aussi souvent renforcées par des contingents venus d'Antioche, Serbie et Hongrie, bien qu'elles fussent formées aux deux tiers de troupes byzantines, contre seulement un tiers de troupes étrangères. Les unités d'archers, d'infanterie et de cavalerie étaient associées pour combiner l'utilisation de leurs différentes armes.
Cette armée comnènienne était très efficace, bien entraînée et bien équipée. C'était une force capable de combattre en Egypte, en Hongrie, en Italie et en Palestine. Cependant, comme c'était le cas de nombreux aspects de l'Etat byzantin sous les Comnène, la plus grande faiblesse de l'armée était que son organisation reposait sur un chef, qui devait être assez puissant et compétent pour pouvoir diriger et mener à bien les opérations. Pendant les règnes d'Alexis Ier, Jean II et Manuel Ier, entre 1081 et 1180 environ, l'armée comnènienne garantit à l'empire une période de sécurité qui permit à la civilisation byzantine de s'épanouir. Mais à la fin du XIIe siècle, le commandement compétent sur lequel l'efficacité de l'armée des Comnène se basait, disparut en grande partie. La conséquence de cette crise d'état-major devait se révéler désastreuse pour l'empire byzantin.
[modifier] Négligence sous les Ange
En 1185, l'empereur Andronic Ier Comnène mourut. Avec lui disparaissait la dynastie Comnène, qui avait procuré à l'empire une série d'empereurs aux grandes qualités militaires pendant près d'un siècle. Elle fut remplacée par la famille des Ange, réputée la dynastie la plus incompétente ayant régné sur l'empire byzantin.
L'armée byzantine est à ce moment un organisme très centralisé. Elle reposait sur le système selon lequel l'empereur rassemblait ses troupes et les conduisait, personnellement, sur le champ de bataille ou à l'assaut des forteresses ennemies. Les généraux étaient étroitement contrôlés et toute instruction et récompense provenait de Constantinople.
Toutefois, l'inaction et l'inaptitude des Anges conduisit rapidement à une décadence de la puissance militaire byzantine à la fois sur terre et sur mer. Entourés d'une foule d'esclaves, maitresses et courtisans, ils permirent à des favoris indignes de gouverner l'empire, alors qu'eux mêmes engloutissaient l'argent extorqué aux provinces dans de couteuses constructions et des dons dispendieux aux églises de la métropole. Ils éparpillèrent tant les richesses que le trésor se trouva épuisé, et leur permissivité à l'égard des officiers de l'armée laissa l'Empire pratiquement sans défense. Ensemble, ils consumèrent la ruine financière de l'État.
Les ennemis de l'empire ne perdirent pas de temps pour profiter de cette situation nouvelle. À l'Est, les turcs violèrent les frontières de l'empire, érodant graduellement le contrôle qu'exerçait Byzance sur l'Asie mineure. Dans le même temps, à l'Ouest, les serbes et les hongrois rompirent définitivement avec l'empire, alors qu'en Bulgarie, la pression fiscale des Anges provoquait une rébellion valaquo-bulgare en 1185. Cette révolte conduisit à l'établissement du Second empire bulgare sur des territoires vitaux pour la sécurité de l'empire dans les Balkans. Kaloyan de Bulgarie annexa plusieurs cités importantes, alors que les Anges consumaient le trésor public en palais et jardins, et tentaient de résoudre la crise par des moyens diplomatiques. L'autorité de Byzance en sortit sévèrement amoindrie, et l'absence de pouvoir au centre de l'empire encouragea sa dislocation, alors que les provinces prirent l'habitude de se tourner vers des puissants locaux pour assurer leur protection. Ceci réduisit d'autant plus les ressources nécessaires à l'empire et son armée, que de larges régions s'émancipèrent de l'autorité du pouvoir central.
[modifier] Analyse de l'effondrement du système militaire byzantin
[modifier] Faiblesses structurelles
C'était dans ces circonstances que la désintégration du système thématique militaire, qui fut le fondement du remarquable succès de l'empire du huitième au onzième siècle, se révéla être une vraie catastrophe pour l'état byzantin.
Le premier avantage du système thématique avait été sa force numérique. On pense que l'armée byzantine de Manuel Comnène (r. 1143-1180) comptait dans ses rangs environ 40.000 hommes. Néanmoins, il est évident que les armées thématique des sièces précédents assuraient l'empire avec une force numérique supérieure. L'armée du thème de Thrakesion à elle seule fournissait 9.600 hommes dans la période 901-936, par exemple. De plus, les armées thématiques étaient placées dans les provinces, et leur indépendance supérieure par rapport au commandement central signifiait qu'ils pouvaient traiter avec des menaces rapidement sur un niveau local. Cela, combiné à leur plus grand nombre, leur permit de munir l'empire d'une meilleure défense.
L'autre avantage clé du système thématique était qu'il offrait à l'empire byzantin une bonne valeur de l'argent. Il fournit les ressources de ce grand nombre d'hommes mobilisés à bon marché. La cessation du système signifiait que les armées devenaient plus chères à la longue, ce qui réduisit le nombre de troupes que les empereurs pouvaient se permettre d'employer. La richesse considérable et l'habileté diplomatique des empereurs comnènes, leur constante attention aux questions militaires, et leur fréquente et énergétique campagne, ont largement pesé dans la balance. Mais la chance pour l'empire d'avoir les talentueux comnènes pour un commandement compétent n'était pas une solution à long terme pour un problème structurel dans l'état byzantin lui-même. Après la mort de Manuel Ier Comnène en 1180, les Ange n'ont pas porté le même soin à la situation militaire que l'ont fait les Comnène, et le résultat était tel que ces faiblesses structurelles commencèrent à se manifester d'elles-mêmes dans le déclin militaire. À partir de 1185, les empereurs byzantins trouvaient de plus en plus difficile de rassembler et payer des forces militaires suffisantes, alors que leur incompétence montra les limites du sytème militaire byzantin tout entier, dépendant qu'il était d'une direction personnelle compétente de l'empereur. Le sommet de la désintégration militaire de l'empire sous les Ange fut atteint le 13 avril 1204, quand les armées de la quatrième croisade pillèrent Constantinople et démontèrent l'empire byzantin. L'ancien empire byzantin était à sa fin.
[modifier] Conclusion
Donc, le problème n'était pas si lié au fait que l'armée comnène était moins efficace au combat (le taux de succès de l'armée thématique était aussi varié que celui de la contrepartie comnène); le problème se présente plutôt ainsi; parce qu'elle était une force plus petite et centralisée, l'armée du douxième siècle avait besoin d'un degré plus élevé de direction compétente de l'empereur afin d'être efficace. Quoique formidable sous un meneur énergique, l'armée comnène n'a pas aussi bien fonctionné au contrôle d'empereurs incompétents ou indifférents. La plus grande indépendance et flexibilité de l'armée thématique a fourni l'ancien empire avec un avantage structurel qui, à présent, était perdu.
Pour toutes les raisons citées ci-dessus, il est possible d'affirmer que la cessation du système thématique fut une grande perte pour l'empire byzantin. Quoiqu'il fallut des siècles pour s'en rendre compte totalement, l'une des forces institutionnelles principales de l'empire byzantin était maintenant disparue. Ce n'était donc pas l'armée qu'il fallait blâmer pour le déclin de l'empire, mais le système qui soutenait tout cela. Sans les fortes institutions sous-jacentes qui ont pu perdurer au-delà du règne de chaque empereur, l'état était extrêmement vulnérable dans les temps de crise. Byzance en vint à trop faire confiance aux seuls empereurs, et sa survie ne fut plus certaine.
[modifier] Armées des royaumes-en-exil et des Paléologues
Après l'année 1204, les empereurs de Nicée gardèrent certains aspects du système établi par les Comnènes. Toutefois, malgré la restoration de l'empire byzantin en 1261, les Byzantins n'ont plus jamais possédé les mêmes niveaux de prospérité, de territoire et de main-d'oeuvre dont pouvaient disposer les empereurs comnènes et leurs prédécesseurs. En conséquence, la gente militaire était constamment à court de fonds. Encore pire était à venir. Particulièrement après la mort de Michel VIII Paléologue en 1282, lorsque des mercenaires peu fiables comme ceux de la grande Compagnie Catalane vinrent à former une proportion des forces restantes jamais atteinte jusque là.
À la chute de Constantinople en 1453, l'armée byzantine s'élevait à environ 7000 hommes, dont 2000 étaient des mercenaires étrangers. Les chances étaient quasiment inexistantes contre les 85.000 troupes ottomanes qui siégaient la ville. Les Byzantins réussirent pendant un temps à retenir la troisième attaque des Janissaires de l'élite du Sultan, mais un général génois chargé de la défense, Giovanni Giustiniani, fut grièvement blessé pendant l'attaque, et son évacuation, le long des remparts, causa une panique dans les rangs des défenseurs. Certains historiens suggèrent que la porte Kerkoporta, de la section des Blachernae, était déverrouillée, et que les Ottomans ont fini par découvrir cette erreur. Les Ottomans s'y ruèrent. L'empereur Constantin XII guida lui-même la dernière défense de la ville, et jetant de côté ses insignes royaux, il plongea tête la première sur les Ottomans qui chargeaient, et périt durant la bataille qui s'ensuivit, sur la rue, avec ses soldats. La chute de la capitale signifiait la fin de l'empire byzantin. L'armée byzantine, dernier descendant de la Légion romaine, n'existait plus.
[modifier] Philosophie militaire byzantine
Malgré l'importance que l'empire byzantin attachait à sa position de protecteur de la vraie et orthodoxe chrétienté contre les Musulmans et les semblables Catholiques, il vaut la peine de noter que l'empire n'a jamais développé ou compris le concept de "guerre sainte". Ces concepts, voisins du Jihad et de la Croisade, lui semblaient être de grossières perversions des textes sacrés ou de simples excuses pour le pillage et la destruction. Les empereurs, généraux et semblables théoriciens militaires trouvaient que la guerre était une défaillance de la façon de régir et des relations politiques, à être de préférence évitée. C'est seulement en faisant la guerre défensivement ou pour venger une injustice, qu'on la considérait comme juste, et dans de tels cas, les Byzantins croyaient que Dieu les protègerait.
[modifier] Grandes batailles de l'empire byzantin
[modifier] Epoque protobyzantine
- Bataille de Tricaméron (533)
- Bataille de Taginae (552)
- Bataille de Ninive (627)
- Bataille de Yarmouk (636)
- Bataille de Carthage (698)
- Siège de Constantinople (718)
[modifier] Epoque mésobyzantine
- Bataille de Pliska (811)
- Bataille de Anchialus (917)
- Bataille de Kleidion (1014)
- Bataille de Mantzikert (1071)
- Bataille de Dyrrhachium (1081)
- Bataille de Levounion (1091)
- Siège de Nicée (1097)
- Bataille de Sirmium (1167)
- Bataille de Myrioképhalon (1176)
[modifier] Epoque tardive
- Bataille de Pélagonie (1259)
- Chute de Constantinople (1453)
[modifier] Notes
- ↑ Constantin VII, Le Livre des Cérémonies.
- ↑ Treadgold.
[modifier] Références
[modifier] Sources principales
- Notitia dignitatum, un document datant du Ve siècle, décrivant la répartition des légions autant dans l'empire romain d'Occident, que dans celui de l'Orient.
[modifier] Sources secondaires
- Bartusis, Mark C., The Late Byzantine Army
- Elton, Hugh, Warfare in Roman Europe
- Haldon, John, Byzantium at War
- Haldon, John, Warfare, state and society in the Byzantine World
- Haldon, John, Byzantine Praetorians
- Heath, Ian, Byzantine Armies 886-1118
- Heath, Ian, Byzantine Armies AD 1118-1461
- MacDowall, Simon, Late Roman Infantryman AD 236–565
- MacDowall, Simon, Late Roman Cavalryman AD 236–565
- Moroz, Irina, "The Idea of Holy War in the Orthodox World", Quaestiones medii aevi novae v. 4
- Nicolle, David, Romano-Byzantine Armies 4th-9th Centuries
- Nicolle, David, Yarmuk AD 636
- Simkins, Michael, The Roman Army from Hadrian to Constantine
- Treadgold, Warren, A History of the Byzantine State and Society
- Treadgold, Warren, Byzantium and Its Armies, 284-1081
- Wise, Terence, Armies of the Crusades
[modifier] Voir aussi
Modèle:Culture byzantine
- Empire byzantin
- Marine byzantine
- Tactique militaire byzantine
- Empire romain
- Armée romaine
- Marine romaine
- Varanges
- Drongaire
- Cataphracte
[modifier] Liens externes
- (en) De re militari.org - La Société d'Histoire Militaire Médiévale