Claude Perdriel
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Claude Perdriel, né le 25 octobre 1926, est un dirigeant de journaux français, à la tête notamment du Nouvel Observateur et dans les années 1970-1980 du quotidien Le Matin de Paris.
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[modifier] Jeunesse
Claude Perdriel est né au sein d’une famille aisée dont la mère est d’origine basque et dont le père dirige une entreprise. Il est élevé dans le 16e arrondissement de Paris avec les règles d’une éducation à l’anglaise qui expliquent sans doute qu’il se montre, en dehors, « d’allure si libre et dégagée[1]».
Élève au lycée Janson-de-Sailly, sa conscience politique émerge notamment à l’occasion de l’application des lois antisémites (1942). Plus tard, il se lie d’amitié avec Jean-Louis Rabaté, un jeune bourgeois qui partage sa passion pour la mécanique et avec qui il emménage après son entrée à Polytechnique (1947). Appartenant à ces « jeunes gens du seizième » qui fréquentent principalement des élèves de grandes écoles, il apparaît alors comme un jeune homme « toujours agité », « désordonné, capricieux, jamais à l’heure » qui garde « rarement plus de six mois la même voiture » et « plus de trois mois la même petite amie »[2].
Il n’en exprime pas moins des opinions de gauche et un goût pour le journalisme qu’illustrent les faux numéros de Combat ou de France-Soir qu’il effectue à son école. Le vif intérêt qu’il manifeste pour la musique, la peinture contemporaine et la littérature l’amène aussi à fréquenter assidûment la librairie des éditions de Minuit. C'est là qu’il se lie d’amitié avec Jacques Brenner, un jeune écrivain qui l’introduit dans les milieux littéraires et l’invite à financer sa revue littéraire : Les Cahiers des Saisons. A partir de 1954, il assure ainsi sur son propre salaire d’ingénieur le financement d’une revue où il côtoie, entre autres, Bernard Frank, Jean-Louis Bory ou Jean-Louis Curtis.
[modifier] De France Observateur au Nouvel Observateur
À la fois directeur et administrateur, il laisse la propriété du titre à son comité de rédaction. Mais la revue, même diffusée par les éditions Fasquelle, s’avère trop déficitaire et doit cesser sa publication en 1958. Un temps associé avec Edmond de Rothschild dans une société d’immobilier, il vend successivement du charbon, des ascenseurs et enfin des stations de traitements d’eau au sein de la Société française d’assainissement qu’il dirige à partir de 1958. Mais s’il s’enrichit grâce à ses brevets, son désir de « diriger un journal […] pour défendre un idéal de justice[3]» reste intact. Ainsi, en 1960, il propose à son ami Jean Daniel de lancer un journal. Mais ce dernier refuse et lui présente Gilles Martinet qui l’invite à aider France Observateur. En 1961, il y apporte ainsi une aide financière de 80 000 francs.
Mais alors qu’il lance la Compagnie valoisienne des constructions industrielles (1962), les tensions de Jean Daniel avec le directeur de L'Express s’aggravent autant que les dettes de France Obs. Ainsi s’engagent au printemps 1964 des négociations entre eux dans lesquelles il apparaît comme le principal appui financier même s’il ne dispose que de la moitié des 1 200 000 francs qu’il déclare investir personnellement. En fait, tant « pour donner confiance aux gens du journal » que « pour intimider d’éventuels concurrents », il « laisse croire qu’il engage beaucoup plus »[4], vend tout ce qu’il possède et s’endette pour le reste. Il prend ainsi 30 % du capital de la SA Le Nouvel Observateur du Monde et la direction de son conseil d'administration.
Mais s’il en assure la direction générale, ses responsabilités restent limitées aux domaines financiers et commerciaux. Chargé d’élaborer le budget prévisionnel de l’ensemble des services au cours du dernier trimestre de chaque année, il répartit et contrôle les moyens octroyés même s’il s’efforce de décentraliser la gestion le plus possible[5]. Au niveau commercial, ses attributions en matière marketing lui permettent, non sans difficultés, d'obtenir un droit de regard sur le choix de la couverture.
Enfin, son intervention en matière rédactionnelle se fait ressentir sur le moyen et le long terme par le pouvoir qu’il a – avec Jean Daniel – de recruter les rédacteurs, de créer les rubriques ou de réaliser les opérations promotionnelles[6]. Ainsi, si son influence est sans doute la plus grande au service « Notre Époque », elle tient surtout par son rôle dans le recrutement de certains. Bernard Frank, Christiane Duparc, Olivier Todd (en 1970), Claire Bretécher ou François-Henri de Virieu lui doivent leur venue. Mais il a parfois du mal à imposer le reclassement de certains journalistes issus d’autres titres dont il est propriétaire comme Pierre Bénichou (en 1968) ou Pierre Ajame (en 1978).
Politiquement difficilement cernable même s’il se dit de gauche, il semble se rattacher à une gauche libérale ouverte aux questions de société portées par Mai 68.
Sinon, il partage pour l’essentiel la ligne politique suivie par Jean Daniel à l’exception de la question israélo-palestinienne sur laquelle il apparaît plus pro-israélien. Il se distingue aussi par une ouverture aux questions d’écologie qui l’amène même à lancer un mensuel écologiste (Le Sauvage) en 1973 ou à soutenir Michel Bosquet dans sa lutte contre le pouvoir nucléaire. Mais il est aussi sensible aux questions de contraception comme l’illustre sa reprise de la revue du Planning Familial, ou aux questions économiques (lancement de La Presse économique en 1975).
[modifier] Campagne de Mitterrand en 1974
À l’initiative de Georges Dayan, François Mitterrand lui propose en juin 1973 de s’occuper de sa prochaine campagne présidentielle, alors prévue pour 1976. Acceptant après que Jean Daniel l’eut fait attendre plus de deux mois pour lui donner son accord, il prend en main la conception et l’animation de l’équipe de campagne en avril 1974. Chargé de la campagne publicitaire et des slogans, il s’installe pour un mois à la tour Montparnasse avec Bernard Villeneuve et Dominique Roussel. Mais il se heurte vite aux fédérations et à André Rousselet qui occupe la même place que lui dans l’organigramme.
Ses propositions de modifier le style et le slogan de la campagne sont rejetées tandis qu’on lui dispute le fichier des souscripteurs qu’il a constitué en partie à partir du Nouvel Observateur, ses lecteurs ayant à eux seuls fourni cinq millions de francs. Il tombe alors en disgrâce auprès de Mitterrand. Ses relations avec ce dernier s’aggravent d’autant plus qu’à la fin, ce dernier lui demande de se défaire du fichier. Claude Perdriel voulant bien le partager mais pas le donner, il s’en suit une dispute. Or, celle-ci s’attise lorsqu’en 1977, il souhaite s’en servir pour lancer un quotidien du matin.
[modifier] L'aventure du Matin de Paris
Cette année 1977 marque une rupture dans son rapport au Nouvel Observateur lié à son départ pour s’assurer du lancement du Matin de Paris (mars 1977).
Certes, initialement, il doit assurer la direction de la rédaction à titre provisoire jusqu’aux élections législatives de mars 1978. Mais il y reste finalement, n’ayant alors plus le temps de participer rédactionnellement au Nouvel Observateur. Après les élections législatives de 1978, son maintien à la tête de la rédaction du Matin est ressenti comme portant préjudice à l’hebdomadaire, sa présence à la tête des directions générales des deux journaux étant dénoncée par le comité d’entreprise du Nouvel Observateur. Par contre, ses méthodes autocratiques comme ses choix rédactionnels ou de développement du quotidien suscitent de vives réactions au Matin où ses rapports avec certains membres de la rédaction sont très tendus.
[modifier] Le Monde
Claude Perdriel est membre du conseil de surveillance du quotidien Le Monde. Lors du vote sur le renouvellement du mandat de Jean-Marie Colombani le 22 mai 2007 à la direction du Monde, Perdriel tente d'abord d'ignorer les conséquences du vote négatif de la Société des Rédacteurs du Monde, mais Colombani doit annoncer finalement son départ. Le 28 juillet, lors du renouvellement de la présidence du conseil de surveillance, Perdriel déclare réélu Alain Minc, alors que ce dernier n'a obtenu que 10 voix sur 20 au mépris des statuts du groupe selon la SRM.[7]
[modifier] Voir aussi
[modifier] Liens internes
[modifier] Lien externe
- Interview de Claude Perdriel dans Stratégies n°1350 du 16/12/2004
[modifier] Notes
- ↑ Jacques Brener, Les Lumières de Paris, Paris, Julliard, 1962, p. 92.
- ↑ Jacques Brener, idem, p. 234.
- ↑ Entretien de Claude Perdriel avec Jean C. Texier, Presse-Actualité, n°96 – décembre 1974, p. 36.
- ↑ Jean Daniel, Cet étranger qui me ressemble (épreuves), Paris, Grasset, 2004, p. 28.
- ↑ Entretien de Claude Perdriel avec Jean C. Texier, Presse-Actualité, n°96 – décembre 1974, p. 36.
- ↑ Entretien de Claude Perdriel avec Jean C. Texier, Presse-Actualité, n°96 – décembre 1974, p. 36.
- ↑ D'un revers de Minc, Catherine Mallaval et Olivier Costemalle, Libération 29 juin 2007, http://www.liberation.fr/actualite/ecrans/264145.FR.php